"Le motif de base de la résistance était l'indignation. Nous vétérans des mouvements de résistance et des forces combattantes de la France libre, nous appelons les jeunes générations à faire vivre, transmettre, l'héritage de la résistance et ses idéaux. Nous leur disons : prenez le relais, indignez-vous ! Les responsables politiques, économiques, intellectuels et l'ensemble de la société ne doivent pas démissionner, ni se laisser impressionner par l'actuelle dictature des marchés financiers qui menacent la paix et la démocratie.

Je vous souhaite à tous, à chacun d'entre vous d'avoir votre motif d'indignation. C'est précieux."

Stéphane Hessel

jeudi 5 août 2010

Ni dans mon assiette, ni dans les champs


A un ami qui avait peut-être une opportunité de travailler dans le domaine des OGM (à cette heure je ne sais pas où il en est dans ce projet) et qui me demandais mon avis sur la pertinence d'une telle possibilité, je lui faisais part de ma réflexion sur ce "Nième" domaine où il nous –les environnementalistes que nous sommes – faut être, une fois de plus, vigilant. Comme pour appuyer cette évidence de vigilance tous azimuts, je me remémore, avec amusement et fatigue, ce que me disait un chasseur de la Baie de Somme (80) qui pointait son fusil sur moi, alors que j'observais les oiseaux, entre deux rondes de surveillance des phoques Veaux Marins : "oui ! Vous les écolos, vous tapez toujours sur les petits chasseurs et jamais sur les centrales nucléaires ni les pétroliers qui dégazent en mer !" Je me disais, alors, qu'il n'avait jamais du vraiment nous écouter, probablement trop abreuvé des litanies de CPNT qu'il devait être, car il aurait su que nous nous devons de toujours être sur nos garde, à l'écoute de tout afin d'être présent, autant que possible, sur tous les fronts, car nous savons, d'expérience, que la cupidité humaine entraine notre espèce à bien des turpitudes environnementales, toutes plus folles les unes que les autres.

Et je lui disais qu'il en était ainsi pour les OGM.

Cependant et pour couper court à certains arguments je ferai, en préambule, un léger détour par l'argument scientifique, pour ne pas dire scientologue, de la recherche OGM. En effet en tant que technicien de la recherche publique et convaincu qu'il nous faut toujours pousser plus loin notre connaissance du "Pourquoi-Comment ?", je pense que la recherche OGM, en laboratoire, est un domaine à ne pas négliger et à poursuivre, car tout ce qui emmène l'homme à augmenter son savoir est une bonne chose … dans les limites fixées par l'éthique, bien évidement ! Car ne dit-on pas que "science sans conscience n'est que ruine de l'âme" ? Et je pense cette petite phrase de Rabelais est tout à fait en lien avec notre sujet car, je pense qu'à partir du moment où cette recherche commence à sortir des laboratoires privés, il est remarquable de voir que les OGM ne sont alors plus de la science, mais juste du capitalisme au service d'actionnaires financiers.

Monsanto c'est la scientologie de l'agriculture.

Ainsi je lui disais que je suis contre la "brevetisation" du vivant issue de ce détestable "occidentalisme triomphant" comme le disait Claude Levi Strauss et que je suis pour le respect de la souveraineté des connaissances traditionnelles. Je lui disais que je suis contre la "brevetisation" du vivant qui appartient à l'humanité dans son ensemble et non pas à des entreprises industrielles qui s'approprient les savoirs ancestraux – preuve donc de leur valeur – comme souvent de vrais biopirates ("Manifeste pour l'avenir des systèmes de connaissance" Unesco 2009) réduisant les peuples vulnérables en des consommateurs captifs de multinationales sans âme.

Ainsi je suis contre l'aliénation des paysans à des multinationales capitalistes, libérales, non respectueuses de l'environnement et des humains qui ne sont, pour elles, qu'une variable d'ajustement afin d'augmenter leurs indécents profits qui ne profitent qu'aux plus riches.

Je lui disais aussi que j'avais regardé, avec intérêt, l'expérience de cet éleveur allemand, Gottfried Gloeckner, qui avait cru au miracle du maïs transgénique (BT 176) dont il avait semé des plants pour nourrir ses vaches. Quatre ans plus tard, cinq vaches sont mortes subitement, puis sept autres, au final c'est tout son cheptel qui est mort à petit feu. Alors bien entendu selon la fiche informative du fournisseur, "il est officiellement prouvé que le gène modifié destiné à repousser les insectes, est éliminé en quelques secondes par l'appareil digestif et n'est présent ni dans le lait, ni dans la viande".

Le paysan a ordonné plusieurs expertises, qui ont établi que "la substance reste beaucoup plus longtemps que prévu dans l'organisme". "Sur des vaches en pleine forme, cela n'a peut être pas d'influence, mais dès qu'elles sont affaiblies, cela peut être mortel", estime l'agriculteur.

Systématiquement, Gottfried a fourni le résultat des expertises au Robert Koch Institut (RKI) à Berlin, chargé de la surveillance de la santé publique.

Au RKI, l'expert Hans-Joerg Buhk n'a pas la clé de la mort des bêtes mais assure que "le maïs BT 176 passe pour être sûr" et qu'aucun problème n'a été signalé en Allemagne, où une poignée d'exploitants l'utilise.

"Gottfried a expérimenté le produit pendant quatre ans, et même s'il n'y a pas de preuve irréfutable, dans le doute, il faut interdire le BT 176", réclame Christoph Then, de Greenpeace.

J'ai regardé le piège cauchemardesque du coton OGM, censé lutter contre le ver de la capsule, qui a été introduit en Inde et qui devait résoudre tous les problèmes d'emplois et de revenus. Mais il en fut tout autrement car non content de ne pas être très efficace sur ses cibles il a permis cependant à d'autres "ravageurs majeurs", jusqu'ici inconnus en Inde, de se développer, "entraînant des pertes économiques importantes" et remettant, dans la misère les paysans. (lire le livre de Vanada Shiva : "les graines du suicide")

Ensuite je ne confonds pas croisements au sein d'un même groupe biologique, destinés à conserver et améliorer les caractères nutritifs, comme cela s'est fait pendant des siècles, et modification de l'ADN, par l'introduction de gènes d'origines animales dans du végétal. Je ne confonds pas, car lancer des OGM en champs libres (même avec les pseudo barrières biologiques obligatoires) c'est, une fois de plus, jouer aux apprentis sorciers et l'on sait ce que cela donne quand l'humain joue à l'apprenti sorcier avec la planète : les solutions sont toutes plus catastrophiques que les problèmes.

Je lui disais que je pensais comme José Bové qui dit "qu'il y a véritablement matière à développer l'agriculture à partir de la biodiversité, notamment en favorisant une recherche participative entre agriculteurs et chercheurs. Cela notamment en raison des changements climatiques et des nécessités de faire face aux nouvelles contraintes liées soit au manque d'eau, soit à des conditions agronomiques nouvelles."

Enfin "aujourd'hui on se rend compte que les OGM n'ont jamais permis d'augmenter les rendements. En revanche si l'on regarde les ventes d'herbicides ou d'insecticides vendus par les firmes qui produisent les OGM, on se rend compte qu'elles augmentent de plus en plus vite dans les pays qui utilisent les OGM. Ce qui tend à prouver que les OGM n'ont pas été mis en place pour utiliser moins d'herbicides ou d'insecticides, mais pour pouvoir vendre les semences modifiées et les produits de traitement qui les accompagnent. C'est donc clairement une bonne opération commerciale au détriment de la biodiversité et de l'environnement." José Bové

Pour conclure je lui disais que j'avais regardé avec attention le film "le monde selon Monsanto" et que je ne pouvais que lui conseiller d'en faire de même car c'est édifiant et affligeant. Je lui disais qu'à vouloir remplacer la main d'œuvre par de la chimie on en arrive à s'intoxiquer. (Cf :Nos enfants nous accuseront) C'est pourquoi je suis pour - ce sera ma note positive de fin - une agriculture adaptée aux terrains et aux climats locaux, une agriculture qui respect l'environnement et l'humain qui en vit. Dans le même temps, chaque citoyen, qui est aussi un consommateur, peut soutenir l'agriculture biologique et l'agriculture de proximité favorisant ainsi une alternative à l'agriculture industrielle.

2 commentaires:

JC GUILLOU a dit…

Tres bien ecrit comme toujours Bruno. Je n'ai finalement pas ete selectionne pour le poste... cela me posait un probleme de conscience donc ce n'est pas plus mal. Il y a ce petit dicton que j'aime bien "la nature fait bien les choses". Il y a des raisons pour lesquelles des plantes poussent mieux a certains endroits, pourquoi il y a tel ou tel insecte... l'ecosysteme est extremement complexe et on ne peut pas je pense calculer toutes les implications si on le change. Regarde en Australie, ou les chameaux font des ravages. L'Australie a la plus grosse population de chameaux sauvage au monde. Ils ont servi pour les chemins de fer et ont ete laisse la apres... de meme pour les moutons etc.. tous les animaux qui ne sont pas indigenes crees aujourd'hui de gros probleme sur les cultures, les rivieres etc... la nature s'adaptera mais cela prend du temps.

Alors pour les OGM oui la difference entre le croisement et la modification genetique est differente. Ce qui est important c'est bien sur l'objectif. Comme tu l'as tres bien dit il ne faut pas interdire la science de mieux comprendre et d'expliquer le vivant. Mais quel est le but.
Dans certains pays d'asie on peut avoir une recolte de riz par an a cause des innondations. On a maintenant trouve un riz qui peut se cultiver pratiquement sous l'eau... il produit plus et on pourra avoir 4 recoltes par an. Au premier abord on peut se dire en effet que c'est un progre et que cela va nourrir des millions de gens...
Mais comme "la nature fait bien les choses" il y a peut etre une raison a ces innondations et surtout des benefices... cette terre n'est peut etre pas faite pour etre surpeuplee a cette endroit ? Outre les consequences sur la sante et peut etre un appauvrissement du sol, ce nouveau riz va peut etre cree une ruee vers l'or avec des milliers ou millions de gens qui soudainement veulent produire du riz.. et que du riz dans des endroits qui n'etaient pas prevu pour...

Bien entendu les entreprises comme Monsento recherchent le profit. Et ils ont mis au point un systeme tres intelligent (meme si il est diabolique) de fidelisation de la clientele (ou d'enchainement).

On sait depuis des lustres et certainement encore plus dans le dernier siecle que lorsque qu'on joue a l'apprenti sorcier cela fini mal... mais comme tu l'as dit l'homme est cupide.

On voit maintenant en Angleterre de la viande d'animaux clones sur les etals... c'est illegal mais qu'elles sont les consequences... Vegetaux, animaux, il ne reste plus que les humains... ca fait peur.. mais c'est un autre sujet.

Bruno BOMBLED a dit…

Merci pour ton commentaire et désolé pour toi, tout de même, pour le poste raté. J'aime ton commentaire il est tout a fait dans la lignée de ce que j'essaye de faire passer. Merci.