"Le motif de base de la résistance était l'indignation. Nous vétérans des mouvements de résistance et des forces combattantes de la France libre, nous appelons les jeunes générations à faire vivre, transmettre, l'héritage de la résistance et ses idéaux. Nous leur disons : prenez le relais, indignez-vous ! Les responsables politiques, économiques, intellectuels et l'ensemble de la société ne doivent pas démissionner, ni se laisser impressionner par l'actuelle dictature des marchés financiers qui menacent la paix et la démocratie.

Je vous souhaite à tous, à chacun d'entre vous d'avoir votre motif d'indignation. C'est précieux."

Stéphane Hessel

mardi 24 mai 2016

Quel espoir dans un monde en faillite ?

La peste noire aux porte de l'Europe : L'Autriche nous a fait passé à coté de la honte ... de justesse. Si l'on peut se réjouir que le pire ne soit pas arrivé la menace n'en est pas morte pour autant. 

Cela devrait interroger les républicains que nous sommes et inciter nos politiques à une immense revue de leurs rôles, de leurs privilèges indécents face à des peuples qui souffrent et à qui ils demandent de toujours faire plus d'efforts alors que eux se baffrent dans les ors de la république, 

Cela devrait nous interroger sur l'organisation de notre monde où l'argent vaut plus et mieux que les humains. Sur notre responsabilité d'occidentaux dans les drames du monde. Sur qui envahi qui ? Sur qui exploite qui ? Sur nos égoïsmes.

Cet événement autrichien est un appel à un monde plus humain qui montre combien les années du capitalisme triomphant de 1989 et du libéralisme roi, basées sur l'illusion d'une auto-régulation vertueuse et raisonnable des marchés, sur la concurrence et la compétition entre les hommes, pour le plus grand profit d'un petit nombre, n'ont apportées que méfiance, haine de l'autre et sentiment d'injustice. 

Les partis de gouvernements, ne sachant que proposer ce modèle, ne peuvent donc plus attirer les électeurs. Les fascistes, au contraire, eux, surfent habilement sur ces sentiments et donnent l'impression, qu'enfin, des politiques pensent aux désespérés. La droite comme la Gauche devrait s'interroger sur leurs responsabilités énormes dans cette monté des nationalistes et des fascistes. Mais ce n'est pas un Juppé, au programme économique de grand-papa, qui risque de bouleverser la marche ascendante des extrêmes droites. Un Juppé qui vise le retour au plein emploi sans préciser le niveau d'exploitation et de précarité, des travailleurs, que cela impliquera. Contrat à 1 euro de l'heure ? L'esclavage comme piste ? Un Juppé qui a également dévoilé plusieurs pistes en matière d'économies en prônant la suppression de l'ISF et le plafonnement des revenus d'assistance ?!?! De bonnes réformes de droite où ce sont les plus pauvres qui doivent faire des efforts et les plus riches qui doivent se gaver. Ainsi ce n'est pas un Juppé ou un Sarkozy, aux programmes économiques d'un autre age qui a fait faillite, ni un Macron ou un Valls qui prônent sans vergogne un libéralisme patronal décomplexé qui freinera la désespérance des citoyens.
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Pétrole : Ce qui est fabuleux, en ces périodes de blocages des raffineries et de craintes de pénuries à la pompe, c'est que cela révèle au moins deux choses sur l'état des mentalités françaises : L'inconscience et l’égoïsme.

En effet il est toujours remarquable d'observer combien ces crises mineures dans la vie du monde, n'interpellent pas grand monde sur l'état de la vulnérabilité de notre système basé uniquement sur la consommation de pétrole. Cela n'interroge jamais sur ce qui est écrit en matière de raréfaction à court terme des énergies fossiles et qui entraînera la chute de notre monde faute de refuser cette vérité qui dérange et que nous refusons d'anticiper pour le plus grand bonheur des multinationales.

Cela révèle, également, comme le fait remarquer mon ami Franck Machu, un esprit d'égoïsme latent chez une certaine frange de population. La préfecture limite la quantité à 20 euros ? Qu'à cela tienne, les gens (certains) viennent faire le plein avec 2 ou 3 cartes bleues, et remplissent leur réservoir de 60 euros. Qu'importe les autres, du moment que eux ont leur provision, au cas où... Et parmi ceux-là, souvent des retraités, qui ont toute la journée pour scruter les pompes encore ouvertes et y faire la queue. "Dès fois qu'ils n'auraient pas ce qu'il faut le lundi pour aller au PMU. L'absence de civisme, le "moi d'abord, les autres je m'en tape"... ça me dégoutte vraiment !". On y imagine bien ce que ça pourrait donner en cas de vraie crise, ou en cas de guerre... Dans le cas présent c'est la peur de manquer qui crée la pénurie. Rien d'autre.

Rappelons que le pétrole est une nasse a double entrée. A tous les coups on perd. Il n'y en a plus assez pour répondre indéfiniment à la demande croissante mais en revanche il y en a encore bien assez pour changer le climat, engendrant troubles et perturbation au sein d'une fragile humanité dénaturée.
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Se bercer d'illusions : Hier midi je déjeunais, à la cantine, avec les collègues et je demandais à une jeune stagiaire pourquoi elle avait pris de l'eau en bouteille alors qu'il y a de l'excellente eau du robinet à la fontaine, à un mètre de la table, qui plus est est plus contrôlée que l'eau minérale, moins polluée et moins polluante de par son transport et son contenant. Cette dernière me répond, très aimablement et gentiment face à cette question, je le reconnais, super chiante, qu'elle ne sait pas, qu'elle ne s'est pas posé la question, qu'elle poursuit ce qui se passe chez ses parents.

Je suis toujours estomaqué de voir combien il y a de gens, autour de moi, qui ne se posent pas de question sur le monde qui les entourent, qui ne remettent pas en cause le système, qui prennent comme normal tout ce que les multinationales leurs offrent et l'organisation qu'elles ont mise en place, pour leur plus grand profit et contre nos intérêts. Ce qui m'interroge encore plus c'est que ceux qui se rebellent le moins, autour de moi, sont les jeunes. Comme j'aimerai qu'ils nous envoient dans la gueule cette société de merde qui les broie et qui ne leur promet, comme avenir, que précarité et instabilité. Mais non ! Ils sont là, impassible, ne pensant qu'à consommer comme d'autres pensent à la cocaïne.

Ils se bercent d'illusions … plus dur sera la chute.

A leur décharge, comme me le dit Yves, nos jeunes ont eu la droite, puis la gauche, puis la droite, puis la gauche sans que cela ne change rien pour eux et leurs parents. Ils ont eu et ont encore le chômage, les p'tits boulots et la précarité comme horizon. Ils ont grandi avec le sentiment que chaque année qui passe, incarne toujours plus de dégradations de leurs conditions de vie et d'abandon face à l'adversité... sentiment de solitude dans un monde sans valeur. Ils connaissent le Secours Populaire, le Secours Catholique ou les resto du coeur... des entreprises qui ne connaissent pas la crise. "Le secours populaire est une entreprise qui fonctionne très bien, 20% de clients en plus tous les ans" nous rappel dans un humour grinçant, Christophe Aleveque. Bonjour les repères ! Merci au MEDEF, merci amis capitalistes, merci camarades libéraux pour tout ce bonheur. Ils ont tout cela, nos jeunes, alors que nous, quand nous étions plus jeunes...si l'on peut dire, nous n'avions eu que la droite. Nous savions qui était notre adversaire, qui était notre espoir.

Aujourd'hui que reste-t-il de ces espoirs ? Rien ou pas grand chose si ce n'est un événement Autrichien, un Front National en embuscade en France, des fascistes en Pologne ... une peste brune qui se répand sur les esprits de ce monde moribond et la boucle est bouclée. 

mercredi 18 mai 2016

Le projet économique de Juppé est une régression. C'est un programme de lutte des classes

Les candidats à la primaire de la droite et du centre précisent leurs intentions en matière économique. Comme la plupart de ses adversaires, Alain Juppé, qui vient de présenter son projet, opte pour des mesures radicales résolument libérales. Une erreur, pour Henri Sterdyniak, co-animateur des Économistes atterrés. Car "cette politique a montré qu'elle ne fonctionnait pas", explique-t-il.

Édité par Sébastien Billard


S’appuyant sur l’échec du quinquennat de François Hollande, la droite propose aujourd’hui un programme profondément réactionnaire, un retour en arrière par la mise en cause méthodique de l’État social, tant par la baisse des dépenses publiques et de la redistribution que par l’affaiblissement du droit du travail et le renoncement à la transition écologique.

Nous souffrons toujours des suites de la crise financière

Les difficultés de la France viennent-elles, comme les économistes bien en cour et les sociologues de médias le prétendent, de trop de socialisme ou d’étatisme ?

C’est oublier d’abord que tous les pays développés souffrent encore des suites de la crise financière, que cette crise n’était pas due à trop de socialisme, mais à l’avidité, à l’aveuglement des marchés financiers.

C’est oublier que le capitalisme financier d’aujourd’hui génère des déséquilibres profonds dont souffrent toutes les économies développées : la victoire du capital sur le travail permise par la mondialisation, la recherche effrénée de compétitivité, la hausse des inégalités de revenu induisent un déficit global de demande dont témoignent les bas taux d’intérêt et d’inflation, la demande doit être soutenue par des bulles financières ou des hausses insoutenables de l’endettement privé ou public ; la dégradation de la situation de l’emploi permet aux entreprises de faire pression sur les salaires et les conditions de travail des salariés, le travail précaire se développe, la cohésion sociale est mise à mal.

Enfin, le refus d’intégrer sérieusement les contraintes écologiques entraîne la planète vers la catastrophe écologique. Faut-il que la France se donne l’objectif de se caler sur le modèle libéral-productiviste ? Faut-il sauter dans un train qui court à la catastrophe ?

Hollande a pratiqué une politique libérale, sans résultat

François Hollande n’a pas été capable d’impulser un nouveau modèle de croissance. Il n’a pas voulu rompre avec une politique européenne qui reposait sur le diptyque "austérité budgétaire/réformes libérales". Aussi a-t-il constamment pratiqué une politique budgétaire restrictive qui a certes réduit le déficit public, mais en brisant la croissance.

Il n’a pas tenté une politique industrielle novatrice reposant sur une impulsion publique forte pour engager la transition écologique, sur la participation des salariés et des citoyens aux décisions des entreprises, sur une réorientation de l’activité des banques hors des marchés financiers vers le crédit aux activités productrices.

Il s’est lancé dans une stratégie de complaisance vis-à-vis des revendications du patronat, oubliant la responsabilité de celui-ci dans la désindustrialisation et la financiarisation de l’économie, prétendant reconstituer leurs marges par des baisses d’impôts financées par des baisses de dépenses publiques, acceptant leur discours : "c’est le droit du travail qui est responsable du chômage".

Cela pour un résultat médiocre. Et le patronat en demande toujours plus.

Il s'agit de prolonger la politique de Hollande-Valls-Macron

Les candidats de la droite refusent de reconnaître la responsabilité du libéralisme dans la crise financière, économique et sociale. Ils retournent à un mythe éculé : supprimons les réglementations, faisons baisser les coûts salariaux, augmentons la durée du travail, diminuons la protection sociale et les impôts, et l’économie livrée à elle-même connaîtra une croissance équilibrée, juste et efficace.

Ils oublient que c’est l’instabilité, l’inefficacité et l’injustice du libéralisme qui ont rendu nécessaire l’intervention publique. Comme les émigrés de retour de Coblence en 1815, ils n’ont rien appris.

Il s’agit donc de rivaliser de propositions libérales, en rien novatrices, celles qui traînent depuis toujours au Medef, chez les hauts fonctionnaires de Bercy, au club Le siècle et autres dîners parisiens. Il s’agit de prolonger la politique de Hollande-Valls-Macron, en en faisant simplement davantage.

Prenons l’exemple du programme "modéré" d’Alain Juppé. Que propose-t-il ?

1. Supprimer l'ISF

Supprimer l’ISF, qui nuirait à l’investissement, bien qu’il ne frappe pas les biens professionnels de sorte que les dirigeants d’entreprises y échappent. N’est-il pas juste que ceux qui ont un patrimoine important, qui bénéficient ainsi fortement des dépenses publiques en supportent (un peu) les coûts de fonctionnement ?

Faut-il céder au chantage et ne pas faire payer d’impôt à ceux qui peuvent se réfugier à l’étranger ? Ne faut-il pas au contraire se battre en Europe et dans le monde pour augmenter la taxation sur les plus riches ? Ne faudrait-il pas priver du droit de vote les Français qui se réfugient à l’étranger pour échapper à l’impôt ?

2. Réduire la taxation des revenus de capital

Il entend réduire fortement la taxation des revenus du capital comme s’il n’était pas normal que les revenus du capital contribuent comme ceux du travail aux dépenses publiques et sociales, comme s’il fallait augmenter les inégalités de revenu.

3. Plafonner les prestations de solidarité

En sens inverse, plafonner les prestations de solidarité, avec l’argument mensonger et maintes fois démenti qu’elles sont plus élevées que les revenus du travail. Créer une allocation sociale unique, comme le propose l’IFRAP, avec une baisse de revenu importante pour les familles, de l’ordre de 20% pour une famille au RSA.

La France doit-elle se donner comme objectif de plonger encore davantage d’enfants dans la pauvreté ? En sens inverse, le plafond du quotient familial serait augmenté. Bref, prendre aux pauvres pour donner aux riches.

4. Accepter toutes les exigences du patronat

Peut-on prétendre favoriser le dialogue social dans les entreprises tout en affaiblissant les syndicats, en augmentant les seuils sociaux, en permettant aux chefs d’entreprises de modifier la réglementation du travail sans consulter les syndicats mais simplement un salarié désigné par ses collègues, laissant le champ libre aux pressions du chef d’entreprise ?

5. Passer aux 39 heures

La durée légale du travail passerait à 39 heures, ce qui veut dire une baisse de salaire de 2,5% pour ceux qui travaillent déjà à cet horaire. Cela veut dire aussi que les entreprises seraient incitées à faire travailler plus longtemps leurs salariés au lieu d’embaucher.

6. Assouplir les conditions de licenciement

Le CDI serait sécurisé (pour les entreprises) : les entreprises pourraient prévoir dans le contrat de travail des conditions de licenciement que les salariés pourraient (librement) accepter (sous la menace de ne pas être embauché). Il suffirait que ces conditions soient suffisamment larges pour que le CDI soit totalement insécurisé pour les travailleurs.

7. Plafonner les indemnités aux prud'hommes

Les indemnités aux prud’hommes seraient plafonnées, comme le souhaitait Macron, même si le débat a bien prouvé que le recours aux prud’hommes à la suite d’un licenciement économique était peu fréquent et que les indemnités n’étaient pas élevées, sauf cas très particulier.

8. Rétablir la dégressivité des allocations chômage

La dégressivité des allocations chômage serait rétablie bien que les partenaires sociaux l’aient supprimée, vu son impact nul sur le retour à l’emploi. Est-ce une mesure de justice quand le taux de chômage est élevé, que ce n’est pas le désir de travailler de chômeurs qui fait défaut, mais bien les emplois offerts ?

9. Porter l'âge de le retraite à 65 ans

L’âge de la retraite serait rapidement porté à 65 ans, sans tenir compte de la situation de l’emploi (des jeunes et des seniors), ni de la longueur et de la pénibilité de la carrière.

Certes, le taux d’activité des seniors a fortement augmenté depuis 2008, malgré la crise, mais le report de l’âge de la retraite s’est traduit aussi par une baisse de l’emploi des jeunes et une hausse du chômage des seniors. Faut-il en faire plus quand les emplois disponibles ne sont pas là ?

10. Réductions d’impôts sur les entreprises, hausse de la TVA

Les politiques qui n’ont guère fonctionné seront poursuivies et amplifiées : nouvelles baisses de cotisations sur les bas salaires (pour inciter les entreprises à offrir des emplois précaires sans perspectives de carrière), nouvelles réductions d’impôts sur les entreprises (26 milliards après les 40 milliards de Hollande) et hausse de la TVA (pour faire payer cette hausse par les ménages, et surtout par les plus pauvres).

11. Réduire les dépenses publiques de 85 milliards

Baisse de 85 milliards des dépenses publiques (mieux que Hollande cette fois qui n’aura fait qu’une baisse de 50 milliards), avec des baisses fortes mais non explicitées en matière de nombres de fonctionnaires (sauf éducation, justice, police, défense, nous dit Juppé, que reste-t-il ? Réduire le nombre de fonctionnaires qui luttent contre la fraude fiscale, ceux de l’Inspection du travail, ceux de la Culture, etc. ?).

Sachant que la France a besoin de 2 millions d’emplois supplémentaires, faut-il commencer par en supprimer 250.000 ? Et ne faut-il pas se poser la question : les emplois dans la culture, la santé, l’éducation, la garde d’enfant ne sont-ils pas plus utiles que beaucoup d’emplois privés (publicitaires, traders, communicants, vendeurs d’assurances ou de complémentaires santé, etc.).

12. Privilégier une politique budgétaire restrictive

Globalement cette politique serait dépressive. L’effet des 85 milliards de baisse des dépenses publiques l’emporterait sur celui des 28 milliards de baisse d’impôt, soit un choc négatif de 2,5% du PIB si cette baisse des dépenses publiques était mise en œuvre.

C'est à peu près le même effet dépressif que celui du programme que Hollande annonçait en 2012 et le même aveuglement : annoncer une politique budgétaire restrictive sans évaluer son impact sur la croissance.

Un programme de lutte des classes

Juppé doit donc compter sur un miracle. La joie des riches qui n’auront plus à payer l’ISF, qui auront de fortes baisses de l’impôt sur le revenu de leur patrimoine ; le soulagement des chefs d’entreprises qui seront les maîtres chez eux permettraient de relancer la production malgré l’insécurité ainsi créée pour les salariés, les pertes de pouvoir d’achat pour les plus pauvres, et aux pertes de possibilités d’emplois pour les jeunes et les chômeurs.

Oui, c’est bien un programme de lutte des classes que Juppé nous propose.