
La bienveillance envers soi et les autres est un travail quotidien car, elle aussi, elle est soumise au principe d'impermanence. Pour la maintenir en éveil il peut être utile de recours à certains moyens que j'appelle des antipoisons.
Tout d'abord, nous pouvons tous faire le constat que nous sommes quotidiennement traversés par des sentiments plus ou moins désagréables comme la colère, la jalousie, la rancune, etc. Ces sentiments, il est rare que nous souhaitions les ressentir. Bien souvent nous aimerions les voir disparaître parce qu'ils nous envahissent, faussent notre jugement et occultent notre joie de vivre. Pour cela, j'ai découvert grâce à Matthieu Ricard une méthode simple et relativement efficace qui est la suivante : à chaque fois que vous identifiez un état d'esprit qui vous est pénible accueillez-le puis exprimez volontairement le sentiment opposé. Par exemple, pour contrecarrer le sentiment de jalousie à l'égard d'une personne, réjouissez-vous à haute voix pour celle-ci. Cela peut paraître totalement artificiel, ça l'est d'ailleurs, mais c'est étrangement assez efficace. En effet, si vous en faîtes l'expérience, vous constaterez que bien souvent le sentiment néfaste disparaît, au moins temporairement. Cette reprogrammation volontaire et immédiate de notre état d'esprit a pour intérêt de nous permettre de prendre nos distances avec des sentiments négatifs, et même de nous en libérer.
Ensuite, il est aujourd'hui largement démontré que notre esprit et notre corps ne sont pas deux entités indépendantes. Notre esprit et notre corps sont en interaction permanente et l'un influence l'autre. Il est une influence que personne ne conteste, c'est la douleur. Il suffit de ressentir une douleur quelque part pour avoir rapidement le moral au plus bas. Mais l'on oublie souvent que le plaisir physique produit exactement l'inverse l'inverse. Ainsi peut-on en faire l'expérience tous les jours : faire un câlin, embrasser, tenir la main, caresser les cheveux, etc. tout cela réconforte. Personnellement, je ne boude plus jamais un petit moment de contact physique quand celui-ci se présente, cela me fait toujours le plus grand bien.
Enfin, j'ai lu il y a quelques temps le compte rendu d'une expérience qui a montré que la perception d'un même dessin animé pouvait être différente par le simple fait de tenir différemment un crayon dans sa bouche. Ainsi les gens ayant regardé le film en tenant le crayon serré entre leurs dents à la façon des pirates avec leur couteau l'ont trouvé bien plus amusant que ceux qui devaient tenir avec leurs lèvres le crayon par son extrémité. Cela s'explique probablement par le fait que dans la première situation les personnes adoptaient une expression faciale proche du rire et dans la seconde situation une expression faciale proche de la contrariété. Essayez, vous verrez c'est assez saisissant. Depuis, lorsque je me sens morose, ou encore lorsqu'une situation me contrarie, je me force à sourire, voire même à rire. C'est ainsi que certains matins, pour améliorer mon humeur, je me retrouve face au miroir de ma salle de bain à sourire un peu bêtement (ce qui est en soi déjà clownesque). Mais le mieux est d'essayer (ce qui ne coûte rien, sauf peut être une franche rigolade). Ce n'est d'ailleurs pas pour rien qu'une association appelée le rire médecin envoie des clowns dans les hôpitaux pour enfants ( « J'aime bien quand ils racontent des blagues et jouent de la musique et surtout quand ils se disputent. J'ai le moral pendant qu'ils sont là. Après ça tombe, mais si je pense à eux le soir, je rigole encore. » Thomas, 12 ans). Ce phénomène semble pouvoir s'expliquer par le fait que notre cerveau serait apparemment dans l'incapacité de ressentir en même temps des émotions a priori contradictoires. Vous verrez que le simple fait de sourire, même de façon totalement artificielle, modifiera de façon positive votre perception des événements, vous permettant ainsi de prendre un peu de recul vis à vis d'eux et ainsi les surmonter plus aisément. Ce sourire et son bien-être, lorsqu'ils apparaissent au cœur de la tempête et qu'ils sont vécus en pleine conscience, nous enseignent que nous pouvons être heureux, même de façon fugace, et que donc cette tempête est, comme toute chose, soumise au principe d'impermanence. Nous ne sommes jamais condamnés à être malheureux durablement.
Conclusion temporaire
Voilà en quelques mots que j'ai voulu simples, exposées quelques unes des méthodes de mixage du bonheur que j'utilise quotidiennement. Soumises elles aussi au principe d'impermanence, il y a fort à parier qu'elles évolueront avec le temps, que je vais en abandonner certaines et en développer d'autres. Mais peu importe de savoir lesquelles et quand. Ce qui m'importe ce que celles-ci me permettent d'être heureux ici et maintenant.
Et vous, Cher Lecteur, quelles sont vos méthodes pour être heureux ? Puissent vos découvertes en ce domaine venir nous enrichir.
Bibliographie :
« au cœur de la tourmente, la pleine conscience » de Jon Kabat-Zinn - éd. De Boeck
« l'éveil des sens » de Jon Kabat-Zinn - éd. Les Arènes
« méditer pour ne plus déprimer » de M. Williams, J. Teasdale, Z. Segal, J. Kabat-Zinn - éd. Odile Jacob
« mettez du bouddhisme dans votre vie » de Bernard Baudouin - éd. De Vecchi
« la grande paix de l'esprit » du Dalaï-lama - éd. La Table Ronde
« plaidoyer pour le bonheur » de Matthieu Ricard - éd. Pocket
« l'apprentissage du bonheur » de Tal Ben-Shahar – éd. Belfond
« vivre heureux – psychologie du bonheur » de Christophe André – éd. Odile Jacob
« la philosophie comme manière de vivre » (entretiens) de Pierre Hadot – éd. Le livre de poche
Sites internet :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Thorstein_Veblen
http://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre_Bourdieu
http://www.cottet.org/girard/index.htm
http://www.leriremedecin.asso.fr/Actions/Temoignages
http://www.ecolederire.com/