Arnaud Montebourg, Ministre du redressement productif vient de présenter ses mesures de soutien à l’industrie automobile. Au même moment, le CCE de PSA s’est ouvert et la direction présente son plan d’économie.
Elle cherche à économiser au moins un milliards à un milliard et demi d’euros pour maintenir ses taux de profit. Les annonces des pertes de l’entreprise sont effectivement de 820 millions d’euros sur le premier semestre de l’année.
Le Ministre a présenté son plan en Conseil des Ministres : augmentation des bonus écologiques, investissement dans les voitures propres, dans les bornes de recharge, achats par l’Etat de voitures électriques et déblocage de 315 millions d’euros pour l’industrie automobile. En gros, l’Etat propose le financement public du maintien des taux de profits de l’industrie automobile. C’est un manque de vue et de compréhension de la situation de la part du gouvernement.
En utilisant l’argent public pour soutenir à court terme l’industrie automobile, le gouvernement fait le jeu du capitalisme. Celui qui demande la libéralisation des marchés, la mise en concurrence, l’exploitation des ressources naturelles et le soutien public lorsque les taux de profits s’effondrent. Aujourd’hui se sont les salariés des sites français qui payent à nouveau l’addition de la concurrence libérale et de l’exploitation capitaliste. Faut il des mesures d’urgence pour maintenir les sites et empêcher l’entreprise de mettre 8 000 salariés sur le carreau ? Evidemment. Mais là n’est pas mon propos. L’Etat n’est pas dans son rôle. Il reproduit les mesures de la droite qui ont conduit à ce cuisant échec : l’année dernière, PSA a dégagé 600 millions de profits dont 250 ont été redistribués aux actionnaires. En 2010, l’industrie automobile a reçu un milliard d’euros de prime à la casse et 6 milliards d’euros de prêts avantageux en 2009, ceci sans parler des exonérations fiscales et sociales, du financement du chômage partiel etc. Voilà à quoi sert l’argent public, à la rémunération des actionnaires des entreprises. Et c’est ce que propose aujourd’hui le gouvernement « socialiste ».
Sous le double effet combiné de la concurrence et de la pression sur les ressources naturelles (notamment le prix du pétrole), l’industrie automobile est vouée à voir la baisse tendancielle de ses taux de profit. Elle est en première ligne à la fois de la mondialisation et de la crise écologique. En accompagnant le système comme le fait le gouvernement, nous sommes voués à voir les salariés se faire licencier et à accepter la flexibilité des emplois restants d’un côté et de l’autre, à voir l’Etat refinancer annuellement ces politiques de casse sociale. Les comportements épileptiques d’A.Montebourg depuis le début du quinquennat qui coure d’entreprise en entreprise pour négocier avec les « repreneurs » - comprendre le patronat – et leur accorde l’argent public sans conditions d’intérêt général est caractéristique de cette absence de vue alternative et long terme du Ministre.
Un modèle industriel voué à l’échec
Comme le chiffre plusieurs études (Syndex WWF, Amis de la Terre notamment), la seule augmentation du baril de pétrole implique, pour maintenir les taux de profit et la rémunération des actionnaires, le licenciement de 70 à 110 000 salariés dans l’industrie automobile française avant la fin de la décennie. C’est ce qui a commencé avec PSA… Que fait le gouvernement aujourd’hui ? Il parie sur le capitalisme vert. En proposant les voitures écologiques, le gouvernement propose le modèle capitalistique que lui a vendu l’industrie automobile. La tension sur le marché automobile vient notamment (en plus de la concurrence libérale) de la fin d’un modèle de pétrole pas cher et qui pousse et poussera la pression économiques sur les automobilistes en limitant fortement la tendance au renouvellement du parc automobile français.
C’est aujourd’hui se qui fait que l’industrie automobile voit ses taux de profit s’effondrer et limite la capacité au renouvellement du capital. Les voitures électriques par exemple ne changent absolument rien au modèle de la voiture individuelle. Elles ne font que déplacer le problème de la ressource pétrolière à celles nécessaires à la construction des batteries : plomb, lithium, métaux rares etc. Car contrairement à la croyance populaire vendue par le capitalisme vert, si les énergies solaires, éolien, géothermiques etc. sont renouvelables, les supports de transformation de ces énergies (ici les batteries électriques) ne le sont pas.
Il faut une planification écologique !
Seul un modèle de transition énergétique et écologique qui nous permette de sortir de l’usage de la voiture individuelle peut être un modèle pérenne. Cela implique notamment que l’Etat planifie le développement des services de transport collectif, rouvre les gares de proximité, augmente le nombre de train et de kilomètres de voies ferrées, y compris pour les tramway (aujourd’hui encore, il y a moins de kilomètres de voies de tramway qu’avant guerre !). C’est donc un autre aménagement du territoire qui est nécessaire en sortant progressivement de celui qui rend impossible de se passer de l’utilisation de la voiture individuelle.
Une autre solution complémentaire est de passer du remplacement de la voiture à sa réparation. Il y a aujourd’hui quantités de pièces de réemploi issues des voitures classées « épaves » suite à un accident. Ces pièces ne sont pas utilisées car les industriels de l’automobile refusent la concurrence de ces pièces qui sont utilisables et préfèrent vendre des pièces de réparation neuves. Simple logique productiviste de maintien des taux de profits. Or si ce modèle est très différent pour les capitalistes, il est en revanche très producteur d’emplois si l’Etat construisait cette filière de démantèlement des voitures usagées, de leur dépollution et de redistribution des pièces encore valables dans un réseau augmenté de réparation automobile.
Voilà le rôle d’un Etat planificateur. Plutôt que de donner de l’argent aux actionnaires de l’industrie capitaliste automobile sans conditions, il devrait reprendre la main et imposer un modèle de planification écologique qui permettrait aux salariés de se reconvertir facilement dans la construction de trams, de trains, de métros et de bus ainsi que dans une nouvelle filière industrielle de déconstruction automobile, de dépollution, de recyclage et de réutilisation des pièces. Mais cela implique du courage politique, une vision à long terme et de conditionner l’usage de l’argent public qui est aujourd’hui utilisé à l’urgence imposée par la vision court termiste du marché capitaliste."
Penser à plus long terme en somme.
Mathieu Agostini
(responsable de la commission écologie du Parti de Gauche)
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