L'objectif de stopper la perte de la biodiversité en 2010 n'ayant pas été atteint, l'ONU appelle les pays à agir vite et de manière efficace alors que l'extinction des espèces continue.
Après l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN), l'ONU confirme à son tour que l'objectif, fixé en 2002 au Sommet de Johannesburg, de stopper la perte de la diversité biologique en 2010 ''n'a pas été atteint'' ! D'autant que plus de 17.000 espèces restent menacées d'extinction, soit 36% des 47.677 espèces répertoriées, et ce malgré des efforts de conservation, selon la dernière Liste Rouge de l'UICN.
Dans son troisième rapport sur les perspectives mondiales de la biodiversité (Global Biodiversity Outlook 3) rendu public le 10 mai, les conclusions de la Convention de l'ONU sur la Diversité Biologique (CDB) ne sont guère plus rassurantes...''Les nouvelles ne sont pas bonnes. Nous continuons à perdre la biodiversité à un rythme jamais vu dans l'histoire - le taux d'extinction étant estimé jusqu'à 1.000 fois plus élevé que le taux historique connu jusqu'à ce jour'', a prévenu Ahmed Djoghlaf, secrétaire exécutif de la CDB, en cette Année internationale de la Biodiversité. Selon l'UICN, 21% de tous les mammifères connus, 30% de tous les amphibiens, 12% des oiseaux, 28% des reptiles, mais aussi 37% des poissons d'eau douce, 70% des plantes et 35% des invertébrés répertoriés à ce jour sont menacés.
''Aucun des 21 objectifs secondaires qui accompagnent l'Objectif biodiversité de 2010 ne peut être confirmés comme ayant été atteints de façon définitive au niveau mondial'' : telle est la conclusion de ce rapport basé sur différentes évaluations scientifiques et 110 bilans nationaux issus des pays signataires de la CDB. Dix des quinze indicateurs principaux développés par la Convention sur la diversité biologique tels que les changements dans les populations des différentes espèces ou leur risque d'extinction, montrent ''des tendances défavorables pour la biodiversité''. Et surtout, aucun pays n'a réussi à atteindre cet objectif 2010, en cette Année internationale de la Biodiversité !
Une extinction des espèces ''continue voire accélérée''
Le déclin de la diversité biologique se poursuit, indique le bilan quadriennal de l'ONU. Les populations de vertébrés ont chuté de près d'un tiers entre 1970 et 2006. Les amphibiens sont parmi les plus touchés. Le rapport a également identifié trois ''points de basculement'', conduisant les écosystèmes ''vers des états moins productifs''. Parmi ces ''points'' figurent : les récifs coralliens menacés par le changement climatique et l'acidification des océans; le ''dépérissement'' de la forêt amazonienne dû notamment à la déforestation et les incendies mais aussi l'impact de ''l'eutrophisation et la domination des algues'' sur les lacs d'eau douce. La diversité génétique des cultures et de l'élevage ne cesse par ailleurs de décliner dans les systèmes agricoles : plus de 60 races d'élevage se sont éteintes depuis 2000.
Même si des ''progrès'' ont été accomplis comme ''l'augmentation des zones protégées à la fois sur terre et dans les eaux côtières'', les habitats naturels ''continuent de diminuer'' dans le monde.
L'enjeu des services rendus par les écosystèmes
Les cinq principales pressions à l'origine de la perte de biodiversité restent donc constantes voire gagnent en intensité : la réduction de l'habitat, la surexploitation des espèces, la pollution, la présence d'espèces exotiques envahissantes et le changement climatique. Tous ces impacts sur la diversité biologique ne sont pas sans conséquences sur les nombreux services écosystémiques rendus aux sociétés humaines : nourriture, fibres, médicaments, eau salubre, pollinisation des cultures, filtration des polluants ou encore protection contre les catastrophes naturelles et intempéries, stockage du carbone et fertilisation des sols, divertissement et support de culture...Tous ces systèmes naturels ''qui sont le support de la vie, de l'économie et des moyens de subsistance sur la planète sont menacés de dégradation rapide et d'effondrement'', alerte le rapport.
La hausse démographique, le développement de nouvelles technologies et activités, la surexploitation des ressources, les pollutions chimiques… pèsent de plus en plus sur les écosystèmes. Les gouvernements n'étant pas parvenus à intégrer la biodiversité et ''ses enjeux'' dans leurs décisions politiques. ''De nombreuses économies restent aveugles à la valeur immense de la diversité des animaux, des plantes et autres formes de vie et à leur rôle dans la santé et le fonctionnement des écosystèmes des forêts, des eaux douces ou des sols'', a regretté le directeur exécutif du Programme de l'ONU pour l'environnement Achim Steiner. ''La vérité est que nous en avons besoin plus que jamais sur une planète de 6 milliards d'individus qui se dirige vers plus de 9 milliards d'individus'', a-t-il poursuivi.
''Les pays peuvent encore agir''
''Ce rapport nous dit que nous atteignons un point de basculement où des dégâts irréversibles pour la planète vont être faits si nous n'agissons pas de toute urgence'', a averti Ahmed Djoghlaf. D'autant que le rapport de l'économiste indien Pavan Sukhdev souligne que la perte de la biodiversité coûterait 3.100 milliards d'euros par an à l'échelle mondiale, soit 6% du PIB mondial en 2050. L'ONU estime que les pays peuvent encore agir pour réduire la crise d'extinction et appelle les gouvernements à établir une ''action urgente'' jusqu'au niveau local et réfléchir à de nouveaux objectifs post-2010. Outre le renforcement des zones protégées, l'ONU demande notamment aux gouvernements de stopper les subventions ''perverses'' aux secteurs ne gérant pas de façon durable leurs ressources.
Le rapport recommande surtout de s'aligner sur les objectifs fixés par le protocole de Kyoto pour empêcher la destruction des ressources végétales et animales.'' Préserver la biodiversité et les écosystèmes peut aider à stocker plus de carbone et à réduire l'accumulation nouvelle de gaz à effet de serre. Les populations seront aussi davantage en mesure de s'adapter aux changements climatiques inévitables si la résilience des écosystèmes est améliorée par l'atténuation des autres pressions qu'elle subit'', explique-t-il. D'autant que le réchauffement pourrait à l'avenir toucher gravement un plus grand nombre d'espèces sauvages, selon l'UICN. Un Groupe intergouvernemental sur la biodiversité et les services écosystémiques (Intergovernmental Platform on Biodiversity and Ecosystem Services, IPBES) est très attendu. Cet IPBES sera à la biodiversité ce que le GIEC est au climat. ''Les défis liés à la perte de la biodiversité et des changements climatiques doivent être abordés par les décideurs avec la même priorité et en étroite coordination'', estime le rapport. L'enjeu réside aussi dans l'amélioration de la communication entre scientifiques et décideurs, et la sensibilisation du public pour comprendre ''la valeur de la biodiversité et les actions qui peuvent être prises pour la protéger''.
Les conclusions du rapport et ses propositions seront discutées lors d'une ''session extraordinaire de haut niveau'' de l'ONU le 22 septembre prochain. Elles serviront aussi de repères à la conférence internationale prévue en octobre à Nagoya (Japon) où les 193 pays signataires de la CDB ont prévu de se fixer de nouveaux objectifs d'ici à 2020. Alors nouvelle utopie ou réel engagement ? Des indicateurs, absents jusqu'à maintenant, pourraient être mis en place à cette occasion pour mesurer les progrès réalisés. Mais pour l'instant, aucune sanction n'est prévue en cas de non atteinte des objectifs.
Rachida Boughriet
Actu-Environnement.com - 11/05/2010
Photo : Fabien Cimetière - Fotolia.com
Après l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN), l'ONU confirme à son tour que l'objectif, fixé en 2002 au Sommet de Johannesburg, de stopper la perte de la diversité biologique en 2010 ''n'a pas été atteint'' ! D'autant que plus de 17.000 espèces restent menacées d'extinction, soit 36% des 47.677 espèces répertoriées, et ce malgré des efforts de conservation, selon la dernière Liste Rouge de l'UICN.
Dans son troisième rapport sur les perspectives mondiales de la biodiversité (Global Biodiversity Outlook 3) rendu public le 10 mai, les conclusions de la Convention de l'ONU sur la Diversité Biologique (CDB) ne sont guère plus rassurantes...''Les nouvelles ne sont pas bonnes. Nous continuons à perdre la biodiversité à un rythme jamais vu dans l'histoire - le taux d'extinction étant estimé jusqu'à 1.000 fois plus élevé que le taux historique connu jusqu'à ce jour'', a prévenu Ahmed Djoghlaf, secrétaire exécutif de la CDB, en cette Année internationale de la Biodiversité. Selon l'UICN, 21% de tous les mammifères connus, 30% de tous les amphibiens, 12% des oiseaux, 28% des reptiles, mais aussi 37% des poissons d'eau douce, 70% des plantes et 35% des invertébrés répertoriés à ce jour sont menacés.
''Aucun des 21 objectifs secondaires qui accompagnent l'Objectif biodiversité de 2010 ne peut être confirmés comme ayant été atteints de façon définitive au niveau mondial'' : telle est la conclusion de ce rapport basé sur différentes évaluations scientifiques et 110 bilans nationaux issus des pays signataires de la CDB. Dix des quinze indicateurs principaux développés par la Convention sur la diversité biologique tels que les changements dans les populations des différentes espèces ou leur risque d'extinction, montrent ''des tendances défavorables pour la biodiversité''. Et surtout, aucun pays n'a réussi à atteindre cet objectif 2010, en cette Année internationale de la Biodiversité !
Une extinction des espèces ''continue voire accélérée''
Le déclin de la diversité biologique se poursuit, indique le bilan quadriennal de l'ONU. Les populations de vertébrés ont chuté de près d'un tiers entre 1970 et 2006. Les amphibiens sont parmi les plus touchés. Le rapport a également identifié trois ''points de basculement'', conduisant les écosystèmes ''vers des états moins productifs''. Parmi ces ''points'' figurent : les récifs coralliens menacés par le changement climatique et l'acidification des océans; le ''dépérissement'' de la forêt amazonienne dû notamment à la déforestation et les incendies mais aussi l'impact de ''l'eutrophisation et la domination des algues'' sur les lacs d'eau douce. La diversité génétique des cultures et de l'élevage ne cesse par ailleurs de décliner dans les systèmes agricoles : plus de 60 races d'élevage se sont éteintes depuis 2000.
Même si des ''progrès'' ont été accomplis comme ''l'augmentation des zones protégées à la fois sur terre et dans les eaux côtières'', les habitats naturels ''continuent de diminuer'' dans le monde.
L'enjeu des services rendus par les écosystèmes
Les cinq principales pressions à l'origine de la perte de biodiversité restent donc constantes voire gagnent en intensité : la réduction de l'habitat, la surexploitation des espèces, la pollution, la présence d'espèces exotiques envahissantes et le changement climatique. Tous ces impacts sur la diversité biologique ne sont pas sans conséquences sur les nombreux services écosystémiques rendus aux sociétés humaines : nourriture, fibres, médicaments, eau salubre, pollinisation des cultures, filtration des polluants ou encore protection contre les catastrophes naturelles et intempéries, stockage du carbone et fertilisation des sols, divertissement et support de culture...Tous ces systèmes naturels ''qui sont le support de la vie, de l'économie et des moyens de subsistance sur la planète sont menacés de dégradation rapide et d'effondrement'', alerte le rapport.
La hausse démographique, le développement de nouvelles technologies et activités, la surexploitation des ressources, les pollutions chimiques… pèsent de plus en plus sur les écosystèmes. Les gouvernements n'étant pas parvenus à intégrer la biodiversité et ''ses enjeux'' dans leurs décisions politiques. ''De nombreuses économies restent aveugles à la valeur immense de la diversité des animaux, des plantes et autres formes de vie et à leur rôle dans la santé et le fonctionnement des écosystèmes des forêts, des eaux douces ou des sols'', a regretté le directeur exécutif du Programme de l'ONU pour l'environnement Achim Steiner. ''La vérité est que nous en avons besoin plus que jamais sur une planète de 6 milliards d'individus qui se dirige vers plus de 9 milliards d'individus'', a-t-il poursuivi.
''Les pays peuvent encore agir''
''Ce rapport nous dit que nous atteignons un point de basculement où des dégâts irréversibles pour la planète vont être faits si nous n'agissons pas de toute urgence'', a averti Ahmed Djoghlaf. D'autant que le rapport de l'économiste indien Pavan Sukhdev souligne que la perte de la biodiversité coûterait 3.100 milliards d'euros par an à l'échelle mondiale, soit 6% du PIB mondial en 2050. L'ONU estime que les pays peuvent encore agir pour réduire la crise d'extinction et appelle les gouvernements à établir une ''action urgente'' jusqu'au niveau local et réfléchir à de nouveaux objectifs post-2010. Outre le renforcement des zones protégées, l'ONU demande notamment aux gouvernements de stopper les subventions ''perverses'' aux secteurs ne gérant pas de façon durable leurs ressources.
Le rapport recommande surtout de s'aligner sur les objectifs fixés par le protocole de Kyoto pour empêcher la destruction des ressources végétales et animales.'' Préserver la biodiversité et les écosystèmes peut aider à stocker plus de carbone et à réduire l'accumulation nouvelle de gaz à effet de serre. Les populations seront aussi davantage en mesure de s'adapter aux changements climatiques inévitables si la résilience des écosystèmes est améliorée par l'atténuation des autres pressions qu'elle subit'', explique-t-il. D'autant que le réchauffement pourrait à l'avenir toucher gravement un plus grand nombre d'espèces sauvages, selon l'UICN. Un Groupe intergouvernemental sur la biodiversité et les services écosystémiques (Intergovernmental Platform on Biodiversity and Ecosystem Services, IPBES) est très attendu. Cet IPBES sera à la biodiversité ce que le GIEC est au climat. ''Les défis liés à la perte de la biodiversité et des changements climatiques doivent être abordés par les décideurs avec la même priorité et en étroite coordination'', estime le rapport. L'enjeu réside aussi dans l'amélioration de la communication entre scientifiques et décideurs, et la sensibilisation du public pour comprendre ''la valeur de la biodiversité et les actions qui peuvent être prises pour la protéger''.
Les conclusions du rapport et ses propositions seront discutées lors d'une ''session extraordinaire de haut niveau'' de l'ONU le 22 septembre prochain. Elles serviront aussi de repères à la conférence internationale prévue en octobre à Nagoya (Japon) où les 193 pays signataires de la CDB ont prévu de se fixer de nouveaux objectifs d'ici à 2020. Alors nouvelle utopie ou réel engagement ? Des indicateurs, absents jusqu'à maintenant, pourraient être mis en place à cette occasion pour mesurer les progrès réalisés. Mais pour l'instant, aucune sanction n'est prévue en cas de non atteinte des objectifs.
Rachida Boughriet
Actu-Environnement.com - 11/05/2010
Photo : Fabien Cimetière - Fotolia.com
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