"Toujours prêt à décrocher le pompon, Emmanuel Macron, le prêcheur de la République, transforme le 1er Mai, journée internationale des travailleurs et travailleuses en lutte pour leurs droits - en fête du travail, de la patrie et du productivisme ... La famille n’est pas loin." nous dit, sur facebook, Esther Benbasa à la parution du tweet du président Macron à l'occasion du 1er mai.
Et en effet, pour moi, la fête des travailleurs est là pour nous rappeler que la vraie vie, celle qui a du sens n'est pas celle enchaînée au poste de travail pour produire des choses mortes, des choses inutiles, des services imbéciles, pour produire de la richesse chez les capitalistes mais, bel et bien, celle que l'on trouve auprès des amis, de la famille, de la nature, de la culture, de l'engagement humaniste et pacifiste. Le travail est evidement nécessaire, mais il faut le laisser à sa place car définitivement il ne sert à rien de perdre sa vie à la gagner.
Mais, je laisse à Jean-Louis Alessandri, la place dans cette publication car je ne saurais mieux dire les choses.
"Putain de Travail!
Depuis quelques années déjà, la réthorique sur le 1er mai tend à faire célébrer le travail. Du “vrai travail” de Pétain à Sarkozy ou encore le dernier tweet de Macron tendent à dévoyer le réel sens de ce jour hautement symbolique pour les travailleurs. Il ne s’agit pas de célébrer “ceux qui aiment le travail” ou le “chérissent parce qu’ils produisent” 1. Au delà du caractère apophasique de cette remarque qui sous entend que le travail est synonyme de “plaisir”, (on aime ce qui nous plaît, on chérit ce qui nous est cher), et que donc seuls les “amoureux” de leur travail, ceux qui le placent au dessus de tout le reste comme valeur humaine, sont les vrais travailleurs, il est évident que cette forme de langage cherche à nous faire penser que nous célébrons le travail tous les 1er mai. Néanmoins, il n’en est rien. L’histoire du mouvement ouvrier depuis le 19ème siècle cherche à s’émanciper du labeur. Au vu des chiffres d’une étude menée en Grande Bretagne, où 49% des travailleurs haïssent leur emploi, il est évident que le travail, pour une moitié d’entre nous, ne revêt pas ce caractère “amoureux” que les politiques veulent nous laisser croire. La révolution industrielle ayant fortement changé le paradigme économique a transformé le terme “métier” en “emploi”. Changement sémantique hautement symbolique puisque l’emploi revêt une idée de “tâche” accomplie étant évaluée à une rémunération, le terme métier, lui, implique une formation, des compétences et des qualités reconnues par la société toute entière. La vision de la société sur le “travail” est devenue biaisée et la horde de travailleurs pauvres n’a fait qu’augmenter tout au long des décennies. Certes, il est évident qu’un travail constitue une forme d’émancipation sociale il n’en reste pas moins que l’idée “de chérir” le travail n’est pas nécessairement en lien avec ce que les travailleurs pensent de leur emploi. Si ce n’est donc as le travail que l’on célèbre le 1er mai, qu’en est-il?
La lutte ouvrière s’est faite dans le sang et les larmes. C’est le combat pour la réduction du temps de travail, pour de meilleures rémunérations, des conditions de labeur plus humaines qui ont été au centre du mouvement ouvrier et syndicaliste. Peu de revendications sociales se basent sur “Aimer son travail”, “le chérir”. Il n’est certes pas incompatible de travailler et d’aimer ce que l’on fait tous les jours, mais pour cela, il faut que les conditions d’emplois soient suffisamment “humaines”. On ne peut aimer ce qui fait souffrir, ce qui ne nous rend pas heureux.
Les manifestants de Hay Market de 1886 tombés sous les balles de la police de Chicago, de Trafalgar Square et du premier Bloody Sunday de l’histoire, le 13 novembre 1887 où 300 manifestants furent arrêtés après avoir vu tomber trois des leurs sous les tirs de la police londonienne, des mineurs de Decazeville en 1886; de Marie Blondeau à Fourmies en 1892, tombée, parmi huit de ses camarades sous les balles des fusils Lebel, des grèves des mineurs à Pontypryd au Pays de galles matées par la troupe, des cheminots dans la vallée de la Rhonda et Tonypandy battus à mort pour certains par les Bobbies anglais, ont tous le point commun d’avoir lutté pour une réduction du temps de travail, des meilleurs salaires et des conditions de labeur humaines. Tous ces événements ont été entachés du sang des manifestants, des exécutions sans preuves et des arrestations. Car, comme le Procureur de la République le dira au sujet des journalistes Roche et Duc Quercy : "Ils ont soutenu des théories sociales. Or, le socialisme est un vain mot"
Un vain mot, voilà ce que le pouvoir a toujours pensé de la lutte ouvrière, une vaine lutte, c’est ÇA le 1er mai, la commémoration de ces luttes ouvrières, de ces tombés sous les coups de buttoirs des différents états, non pas l’amour du travail et de ceux qui le chérissent. Les ouvriers chériront leur travail lorsque leurs revendications sociales, légitimes seront entendues. Que la 7ème puissance mondiale se regarde enfin en face, qu’elle analyse la situation et alors le peuple aimera son travail, le chérira. Jusque là, le 1er mai sera le jour de la commémoration des leurs tombés pour leurs droits à vivre dignement de leur labeur.
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