"Le motif de base de la résistance était l'indignation. Nous vétérans des mouvements de résistance et des forces combattantes de la France libre, nous appelons les jeunes générations à faire vivre, transmettre, l'héritage de la résistance et ses idéaux. Nous leur disons : prenez le relais, indignez-vous ! Les responsables politiques, économiques, intellectuels et l'ensemble de la société ne doivent pas démissionner, ni se laisser impressionner par l'actuelle dictature des marchés financiers qui menacent la paix et la démocratie.

Je vous souhaite à tous, à chacun d'entre vous d'avoir votre motif d'indignation. C'est précieux."

Stéphane Hessel

mercredi 22 octobre 2008

Il est temps de dire stop !

Avec tout le respect que je dois à la direction, aux chefs de thèmes et d'équipes, je crois de mon devoir de citoyen et d'agent de la recherche publique de vous écrire ce texte afin de vous dire qu'il est vraiment temps que nous fassions stopper, collectivement, la casse de la recherche en France. Ce qui me pousse à vous écrire est ce projet de taxe de 10 % sur tous les contrats entrant au LSCE pour subvenir aux besoins de support de notre laboratoire.

Je pense qu'après la mise en place de l'ANR et son incompatibilité avec une recherche sur le long terme, la recrudescence de la précarité, l'individualisation des salaires, la division du CNRS en instituts (diviser pour mieux régner !), les forfaits journaliers de temps bateau qui augmentent, le pilotage de la recherche par les politiques, ... c'est la goutte de trop.

Que l'on ne vienne pas me dire que je suis contre la solidarité et la redistribution, ceux qui me connaissent savent que j'ai toujours œuvré pour cela. Mais là, au nom de la solidarité, on masque le désengagement de l'Etat de ses prérogatives. Ainsi je suis contre le mutualisme quand celui-ci est synonyme de défaillance des devoirs de l'Etat qui est notre plus grande mutuelle. Et là, en l'occurrence, on assiste à une vraie démission de l'Etat. On assiste à une inversion des responsabilités. En effet, souvenez vous de ce temps, pas si lointain, où c'était l'état qui subvenait aux besoins des laboratoires, maintenant ce sera aux chercheurs de le faire. Personnellement je ne trouve pas cela normal. Personnellement je trouve cela profondément contre productif. Les chercheurs deviennent, de fait, des commerciaux, des démarcheurs qui vont quémander leur obole aux organismes qui possèdent les fonds. Cela, bien évidement, au détriment de la recherche scientifique fondamentale française, par le temps perdu à trouver des subventions (dossiers, talk, réunions etc…), par une augmentation du stress, par une augmentation des rivalités, de l'espionnage, de la culpabilité face aux CDD qui ne trouvent plus leur place dans l'espace de la recherche. Et je dis cela malgré l'abnégation admirable dont font preuves tous nos docteurs.

Alors on nous dit qu'il est normal de prendre le support sur les contrats ANR, car l'Etat y a aussi transféré les budgets, autrefois dédiés aux supports et que ces budgets sont en hausse. Mais a-t-on la garantie que ces transferts aient été fait € pour € ? A-t-on la garantie que ces budgets continueront à augmenter quand nous ne recevrons plus de soutien de base ?

Je ne suis pas contre, non plus, à ce que nous fassions prendre conscience, aux agents, que s'ils peuvent, l'esprit tranquille, vaquer à leur science, c'est que leur activité n'est possible que parce que la collectivité la prend en partie en charge. Mais cela devrait être une chose acquise, pour des citoyens adultes qui sont sensés connaître la finalité de l'impôt.

Alors je pose la question comment allons-nous déterminer le moment où nos conditions de travail seront tellement devenues insupportables que nous réagirons ? Quand la taxe sera de 15 % ? de 30 % ? de 50 % ? Quand nos salaires dépendront des contrats ANR ?

Moi je pense que le temps est venu de réagir massivement.

Et ainsi je suis pour une solution radicale qui ne peut s'accommoder de solutions-rustine ou de pragmatisme. Je suis pour une solution radicale qui ne peut s'accommoder de solutions qui ne font que gérer la crise et faire que "business as usual". Je suis pour laisser les laboratoires ne plus pouvoir payer leur téléphone, le ménage, le chauffage etc … et qu'ensuite nous alertions l'opinion, via nos têtes d'affiches parées de leur prix Nobel, pour dénoncer les conditions de travail et faire savoir combien l'Etat méprise sa recherche.

Il y a quelques années la fac d'Orsay l'a fait et cela a porté ses fruits.

Comme dans toute action il suffit de se mobiliser et de le vouloir.

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