"Le motif de base de la résistance était l'indignation. Nous vétérans des mouvements de résistance et des forces combattantes de la France libre, nous appelons les jeunes générations à faire vivre, transmettre, l'héritage de la résistance et ses idéaux. Nous leur disons : prenez le relais, indignez-vous ! Les responsables politiques, économiques, intellectuels et l'ensemble de la société ne doivent pas démissionner, ni se laisser impressionner par l'actuelle dictature des marchés financiers qui menacent la paix et la démocratie.

Je vous souhaite à tous, à chacun d'entre vous d'avoir votre motif d'indignation. C'est précieux."

Stéphane Hessel

mercredi 29 août 2018

Hulot aura essayé, respect M. Hulot.

Hulot a démissionné ! Quel aveu d'échec pour tout le monde, lui-même, d’abord, en n’ayant pas réussi à convaincre, Macron ensuite, qui perd le seul ancrage environnemental qui pouvait le forcer, un tant soit peu, à penser « environnement » et penser que nous pourrions y croire et nous tous qui, à des degrés différents, l’ont défié, ne l’ont pas soutenu alors qu’il avait totalement besoin de nous tous. Quelle mise en lumière du vrai visage du Macronisme. L'illusion est enfin totalement dissipée. Il n'y a pas de place pour l'écologie dans le Macronisme. Avec le départ de Hulot c'est la démonstration imparable que l'écologie n'est pas soluble avec la droite. Hulot aura essayé ! Mais sans une mobilisation populaire, sans aucun soutien de l'opinion, il ne pouvait rien ! Nous étions ses troupes et ses troupes n'étaient pas là. Dès lors, épuisé par les renoncements, les petits pas et les gros arrangements, il a jeté l’éponge.

Ceux qui me connaissent bien savent que depuis très longtemps maintenant, je dis, à qui veut l'entendre, que les petits pas, que les petits gestes, que les petites avancées ne suffisent plus et qu'il faut passer à la vitesse supérieure. Depuis longtemps je compare les avancées environnementales comme la course d'un cycliste avec un motard, les motards étant les pollueurs et autres saccageurs. Alors oui certes nous avançons mais les destructions avancent bien plus vite. "L'état de la planète ne s'accomode pas des petits pas" nous dit Nicolas Hulot. ... heureux de m'entendre donner raison par Nicolas Hulot mais parfaitement triste d'avoir raison.

Tantôt dépressif, tantôt romantique, présenté comme un adepte du "grand soir", Nicolas Hulot n'était, à en croire ses anciens collègues du gouvernement, décidément pas fait pour gouverner car trop fragile, trop idéaliste. Après avoir fustigé ses mauvaises manières, voilà la basse condescendance de ceux qui sont droit dans leurs bottes pour minimiser leurs fautes et amoindrir un geste fort. Finalement pour tous ces sinistres, il n'y aurait que le geste d'un dépressif. Pourquoi pas d'un suicidaire pendant que vous y êtes ? Finalement on fait comme pour les "femmes", les écolos ils ne sont pas sérieux, ils ne sont que dans l'émotion.

Quant à Chevènement il ne trouve rien de mieux à dire que les écologistes "sapent la compétitivité de la France. Celle-ci est le principal problème que nous avons à résoudre, comme en témoigne le déficit (75 milliards d’euros) de notre balance commerciale. Il est temps de se recentrer sur l’essentiel." Et ainsi, pour ce vieillard issu d'un siècle qui nous a entraîné là où nous sommes aujourd'hui, la démission de Nicolas Hulot est une bonne nouvelle car le principal pour un pays c'est ses tunes pas sa durabilité ni celle de l'humanité. La vieillesse est un naufrage.

Ces gens me dégoutent, c'est tellement plus simple de le disqualifier et de se mettre la tête dans le sable.

Hulot a démissionné, pauvre de nous, nous voici seuls, passagers d’un paquebot fou, piloté par d’aveugles dogmatiques aux ordres des lobbies.

Hulot aura essayé, respect M. Hulot.

Ci-après le témoignage touchant d’un de ses compagnons de route, le biologiste et photographe sous-marin montpelliérain, Laurent Ballesta, connu, notamment pour sa participation à Ushuaïa Nature et ses documentaires diffusés sur Arte, qui publie, dans Midi Libre, une tribune émouvante en réaction à la démission de Nicolas Hulot.


"La mer est sublime ce matin, épaisse et limpide à la fois, comme seule la Méditerranée sait l’être. En sortant de l’eau, il n’est pas encore 8h30, la journée s’annonce belle, et puis hélas j’allume la radio. Nicolas Hulot démissionne.



La stupéfaction est aussi grande pour les intervieweurs que pour les auditeurs. Son ton calme et ému, ni rageur, ni vengeur impose le respect et c’est à peine si les journalistes osent l’interrompre. On assiste, presque muet, à un instant de grâce, quand bien même est-il dramatique.

Bien sûr, dans un sursaut d’égo d’animatrice vedette, on lui pose cette question vicieuse pour savoir si ce renoncement ne serait pas l’aveu de son incompétence. Il répond "peut-être" parce que, lui, en a fini depuis longtemps, avec l’orgueil.

Moi je crois savoir que ce boulot il le fait pour de bonnes raisons, pas pour une bonne fonction. Pouvoir d’influence, avantage de la notoriété, Nicolas n’a jamais eu besoin d’être ministre pour posséder ces atouts-là.

Au contraire, en acceptant le poste, il savait qu’il les fragiliserait. Il n’avait rien de personnel à y gagner et il l’a fait quand même, preuve que c’est la cause et les convictions qui l’ont conduit à accepter. Et ce sont ces mêmes convictions qu’il le conduise aujourd’hui à refuser de continuer.

Je l’écoute et mes sentiments sont paradoxaux : je suis rassuré de voir qu’il existe encore des hommes influents avec autant d’intégrité, mais je suis angoissé par ce qui nous attend désormais. Je suis fier d’être l’ami d’un tel homme et déçu qu’il n’ait pas réussi plus longtemps.

J’entends déjà les sarcasmes des cyniques "je l’avais bien dit ! C’était foutu d’avance dans un tel gouvernement". Croyez-vous vraiment que Nicolas Hulot était si naïf ? Il est des causes trop sérieuses pour qu’on les passe au filtre du possible avant de les embrasser.

Je crois que Nicolas ne s’est jamais demandé si les ambitions étaient réalisables, seulement si elles étaient nécessaires. Il aura tout essayé au cours de sa carrière : nous émouvoir avec des films, faire de l’éducation avec sa fondation, du conseil auprès des présidents, du lobbying auprès des plus grandes sociétés, et puis enfin, entrer au gouvernement. On ne peut rien lui reprocher.

Dans ce moment de désespoir, je veux encore croire que le choc de son départ sera le défibrillateur qui va ranimer les consciences des gouvernants et des gouvernés. Il n’y a aucune raison d’être optimiste, mais il n’y aucun intérêt à être pessimiste.

Que l’on dise "ça va s’arranger" ou bien "de toute façon, c’est foutu", ces deux postures sont stériles. Mieux vaut encore se taire et agir. Puisqu’on ne lui permet plus d’agir, il a raison de partir et de se taire. Même si je veux croire à un sursaut futur.

En attendant, demain matin, je retournerai plonger, admirer des petits bouts de notre belle planète, explorer les fonds marins, y prendre du plaisir autant que possible, et même essayer de partager ce plaisir, essayer de profiter sans gaspiller, de jouir sans nuire."

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